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La détermination des variétés de pommes (I)

I LA METHODE DE DÉTERMINATION

Verger

Verger conservatoire de variétés à cidre photo©MarkGleonec

Il est fréquent que les nouveaux propriétaires d’un jardin planté de pommiers, y trouvent des variétés dont ils ignorent tout, sinon qu’elles ont goûteuses, et qu’ils essayent d’en retrouver les noms. 

Je n’échappe pas à des demandes de cet ordre, mais étant plus habitué à mettre le « nez dans le verre » plutôt que les « bottes dans le verger » ma réponse se limite à conseiller d’aller voir des voisins jardiniers (dont beaucoup ont des connaissances insoupçonnées), des associations de pomologie (qui généralement s’occupent de vergers conservatoires), des pépiniériste spécialisés et même des sites internet dédiés à la pomme.

Cela donne souvent une bonne indication, mais comme il y aurait en Bretagne, de Nantes à Brest, environ 5 000 variétés de pommes dont approximativement 3 000 seraient répertoriées, il est facile de comprendre qu’une bonne méthode de vérification s’impose pour confirmer les informations recueillies (ou s’apercevoir que l’on a chez soi une variété originale).

Un an d’observations

Le hasard de mes collaborations à diverses manifestations m’en ayant donné l’opportunité, j’ai décidé de m’y mettre à mon tour en compagnie d’une petite équipe. Sans expérience de le sujet, j’ai commencé par chercher une méthode de détermination. Cet article est donc le premier de mon histoire sur cette quête qui doit se poursuivre au moins un an.

En effet, la première évidence d’un travail de détermination d’une variété de pommes est que cela porte sur un an. Il faut suivre le rythme de l’arbre, mais cela commence souvent par le fruit (c’est en y croquant que se pose la question de sa variété). Il faut l’observer, le photographier, le goûter et lui attribuer un nom provisoire (ou plusieurs s’il y a doute). Ensuite, et c’est là que ça devient intéressant, il faut observer la forme de l’arbre nu dans le courant de l’hiver, la floraison au printemps, les feuilles en été et enfin le fruit à nouveau quand revient l’automne. Il ne reste plus qu’a confronter toutes ces observations avec la documentation existante et de s’entretenir avec un spécialiste, pour valider (ou pas) le nom de la variété. Il peut arriver qu’en cas d’échec, un deuxième cycle d’un an soit nécessaire.

Une méthode simple mais exigeante.

Cela semble donc relativement simple, mais il faut y passer un peu de temps, il faut être patient et surtout avancer avec rigueur.

1 – Choisir des échantillons en prélevant un lot de dix fruits et en y sélectionnant les cinq fruits les plus semblables (en éliminant les plus petits et les plus gros). Bien évidemment ces échantillons sont à rassembler dans un petit sac (un par variété) sur le quel il faut noter précisément le nom provisoire de la variété et l’emplacement exact de l’arbre (au besoin le numéroter).

2 – Ouvrir une fiche de détermination claire permettant de noter les observations et ménageant des espaces pour le fruit, la fleur, la feuille et l’arbre, ainsi qu’un espace complémentaire pour rassembler les informations sur le site avec l’emplacement de l’arbre et les renseignements sur son histoire par les personnes qui s’en sont occupé.

Les associations de pomologie disposent généralement de bons modèles de fiches de détermination.

3 – Collecter et transcrire des informations révélées par l’observation in situ (joindre les photos) et auprès des familiers de l’arbre, en privilégiant les détails susceptibles d’aider à la détermination. Noter les noms présumés de la variété, l’éventuel plan du verger, etc…

4 – Renseigner les critères de détermination en privilégiant les caractéristiques du fruit moyen de l’échantillon. Il est souvent utile de prendre l’avis de plusieurs observateurs et dans tous les cas inutile de relever un critère s’il parait douteux.

5 – Examiner les choix possibles en comparant (y compris avec dégustation) avec un fruit témoin connu (s’il existe). Confronter ses propres observations avec les recueils existants (livres ou sites web) et si cela est possible avec l’avis d’un expert (association, pépiniériste, arboriculteur, commerciaux, etc..)

DegustpommeDéguster (et noter) les pommes

6 – Examiner les sources d’information, en priorité les sources de description, avec une attention particulière aux caractéristiques non saisies qui peuvent se révéler discriminantes. Éliminer les noms de variétés ayant un critère rédhibitoire, les différentes prises de vues et images existantes sont ici très utiles.

7 – Retenir un ou plusieurs noms possibles et le (les) noter sur la fiche de détermination.

8 – Validation de l’identification par le suivi tout au long du cycle de l’arbre.

Dès la chute complète des feuilles (et avant une éventuelle taille), vérifier la correspondance de la forme de l’arbre étudié avec la forme attendue de la variété (connue par la documentation ou les avis d’experts).

Au printemps, il faut observer la floraison et vérifier que sa période correspond bien à celle de la variété retenue (attention la floraison peut s’étaler sur une période assez large).

En été, il faut vérifier également la correspondance du feuillage.

Enfin lors de la récolte suivante on peut éventuellement vérifier (si elle y est sujette) la sensibilité de la variété à l’alternance.

Au bout de ce cycle d’observations, l’appartenance de la pomme étudiée à telle ou telle variété passe du stade probable à celui de quasi-certain. Dans le cas contraire, il faut recommencer le cycle sur une autre base.

Une affaire de pomme, mais pas seulement

Nous avons commencé ce travail sur deux vergers, un de pommes à couteau et l’autre de pommes à cidre. Nous avons déjà un certain nombre de certitudes car ces vergers avaient été initialement constitués dans les règles, malheureusement le poids des ans, le passage des tempêtes et les noms très locaux attribués plusieurs variétés ont quelque peu brouillé les choses, nous imposant ce travail de vérification.

Cette expérience n’est pas seulement une affaire de plant, de fruit et de verger. C’est aussi une belle plongée dans une culture rurale parfois délaissée. Dans bien des villages, nombre de fruits ont des noms inspirés par un lieu, un événement ou un personnage local. Parfois même, un nom en langue bretonne vous amène à une véritable enquête car outre la prononciation (comme dans toutes les langues, elle varie légèrement d’un locuteur à l’autre), le mot lui même peut être utilisé au second degré. Il n’est donc pas rare qu’une variété que l’on pouvait croire très locale provienne en réalité d’Angleterre, de Russie, d’Amérique ou… du canton d’à coté.

En tous cas, si vous avez dans votre jardin une pomme anonyme, prenez un peu de temps, lui rechercher son nom offre toujours une belle récompense car ce sont (sauf quelques pommes à cidre très typées) des fruits très gouteux et il y a de fortes chances qu’un joli nom en bonifie les saveurs.

Eostig KergilesEostik Kergiles Photo©Mark Gleonec

Quelles histoires peuvent bien cacher les jolies pommes appelées Eostik (Rossignol) Kergiles ? À priori la variété n’est pas répertoriée, mais nous en saurons peut-être un peu plus dans un an (ou deux).

Quelques sites d’associations

Les mordus de la pomme à Quevert (22) : http://www.mordusdelapomme.fr

Pôle fruitier de Bretagne à Lanvalley (22) : http://www.polefruitierbretagne.fr

Avalou Plabenneg à Plabennec (29) : http://avalouplabenneg.voila.net

Arborépom à Arzano (29) : http://arborepom.blogspot.fr

Il existe une association nationale française basée à Belfort (90), Les Croqueurs de Pommes – http://www.croqueurs-national.fr – Qui regroupe 63 associations locales dont :

Croqueurs de pommes d’Île de France à Eaubonne (95) : http://www.croqueur-idf.fr

Croqueurs de pommes de l’Anjou à Saint Sylvain d’Anjou (49)  : http://www.croqueurs-anjou.org

A noter en Cornouaille, les vergers conservatoires de Penfoulig à Fouesnant, celui de la Ferme du Moros à Concarneau et celui du Manoir de Kernault à Mellac près de Quimperlé (il y en probablement quelques autres).

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